L'histoire tumultueuse des Huron Wendat


Selon la tradition locale, les Wendats, connus à  l'époque sous le nom de « Hurons » pour les Français, ont d'abord pris contact avec les Européens en 1535 lorsque Jacques Cartier avait débarqué à  Hochelaga. Par la suite, cette population s'est progressivement déplacée vers l'ouest et s'est jointe à  d'autres groupes autochtones pour former ce que l'on appelle aujourd'hui la « Confédération des Hurons ». Ce n'est qu'en 1609, près du fleuve Saint-Laurent, un an après la fondation de Québec par Samuel de Champlain, qu'ils reprendront contact avec les Européens.

Champlain avait créé un réseau commercial entre les Algonquins, mais il craignait la menace constante des Iroquoiens. Quand Etienne Brule vint chez les Hurons pour apprendre leur langue et leur culture en 1610, il découvrit un potentiel commercial intéressant, avec des fourrures de qualité et artefacts d'exception, œuvre des tribus locales. C'est ce qui suscitera l'intérêt de Champlain qui fera « des affaires » avec les Hurons... cet intérêt a d'ailleurs été couché sur papier en 1614 avec un accord commercial officiel signé à  Québec.

Voici l'histoire tumultueuse des Huron Wendat !

Huron Wendat : quelques précisions linguistiques

Les Hurons-Wendat étaient les plus septentrionaux des peuples iroquoiens qui, au XVIIe siècle, habitaient la région située entre le lac Simcoe et la baie Georgienne, connue historiquement sous le nom de Wendake (ou Huronie). Leur confédération se composait de quatre nations alliées : l'Attignawantan (ours), l'Atingeennonniahak (cordon), l'Arendarhonon (rocher) et le Tohontaenrat (cerf). « Wendat » signifie « insulaires » ou « habitants d'une péninsule ».

Le terme « Iroquoien » désigne à  la fois un modèle culturel et une famille linguistique qui comprennent les Iroquoiens du Nord de la région des Grands Lacs, les Cherokees, présents dans le sud des Appalaches, et les Tuscarora, dans la côte Atlantique. Il ne faut donc pas confondre le terme Iroquoien avec celui d' « iroquois », un terme adopté par les Européens pour désigner la Confédération des Haudenosaunee ou des Cinq Nations. Un glissement sémantique a fait que ces deux termes sont parfois utilisés de manière interchangeable.

Les principales composantes de la vie wendat ressemblent à  celles des autres Iroquoiens du Nord. Leur mode de vie reposait sur une économie basée sur l'horticulture (maà¯s, haricots et courges, que l'on appelle « les trois sœurs » dans la culture locale) complétée par les plantes sauvages, le poisson et le gibier. Les communautés se sont installées dans des villages fortifiés composés de maisons longues recouvertes d'écorce. Ces habitations de fortune étaient partagées par des familles élargies dans un système matriarcal. L'appartenance à  un clan a été étendue au-delà  du village pour rassembler d'autres communautés, dans un contexte où les Wendat étaient persécutés de toute part. L'intégration des villages au sein des tribus et des confédérations a donné naissance à  un ensemble de structures de gouvernance, de croyances religieuses et de pratiques cérémonielles communes qui ont traversé l'épreuve du temps et surtout de la guerre.

Les Huron Wendat avant l'an 1634

De 1300 à  1600 après J.-C., une grande partie des communautés ancestrales des Wendats se trouvait sur leur territoire historique, mais aussi le long des rivières qui se déversaient sur la rive nord du lac Ontario, entre la rivière Credit et le comté de Prince Edward. Dans les années 1620, chaque nation constituante des Wendats possédait un village rigoureusement fortifié (Ossossane, Scanonaenrat, Teanaustaye et Contarea) que défendaient plusieurs centaines de guerriers prêts à  affronter les assauts des Haudenosaunee avec lesquels ils étaient constamment en guerre. À l'exception du Tahontaenrat (cerf), les nations ancestrales avaient également à  leur disposition des villages auxiliaires et des localités voisines où les communautés algonquiennes du nord venaient passer l'hiver. Selon les récits jésuites du XVIIe siècle, la population Wendat-Tionontataté comptait 30 à  35 000 habitants avant l'épidémie de 1634.

Les Huron Wendat décimés par les épidémies et les guerres

Ce fut sans doute l'un des pans les plus décisifs de l'histoire du Canada contemporain. Les Hurons-Wendats de Wendake, autrefois appelés les Hurons de Lorette, sont originaires de la région de la baie Georgienne. Jusqu'au milieu du XVIIe siècle, ces ancêtres des Ontariens et des Québécois occupaient un vaste territoire chevauchant une partie des Etats-Unis actuels, depuis Détroit jusqu'en Oklahoma, le sud-est de l'Ontario, dans les régions actuelles de Penetangueshene et de Midland, ainsi que la province actuelle du Québec. Comme la majorité des autochtones nord-américains, les Hurons étaient des chasseurs - trappeurs qui évoluaient dans l'ensemble de ce territoire, avec une surreprésentation dans les Laurentides, entre la partie centrale du fleuve Saint-Maurice et le Saguenay.

Entre 1634 et 1650, la Confédération wyandotte est démembrée. Ses habitants, regroupés en quatre ou cinq tribus influentes, sont dispersés. On estime que la population huronne comptait environ 20 000 à  30 000 habitants en 1634. En 1650, il ne restait plus que quelques centaines d'individus : la nation fut décimée par une série d'évènements dramatiques, comme la succession des épidémies « apportées » par les Européens et la guerre meurtrière que se sont livrés les Hurons, les Iroquois, les Français et les Britanniques. Une partie de la population huronne avait également été intégrée à  la Confédération iroquoise, ce qui a réduit davantage leurs effectifs. Les survivants de ces épisodes tragiques se divisent en deux groupes : les Wyandots du Grand Lac et les Hurons-Wendat, qui sont les ancêtres des Hurons-Wendat de Wendake.

L'installation des Hurons-Wendat à  Québec

Bien que pacifiquement installés en petits groupes dans la région de Québec, les Hurons-Wendats continueront de subir les assauts des Iroquois qui les harcèleront sur une base quasi-quotidienne. Pour survivre, les Hurons-Wendat changeront leur mode de vie, leurs coutumes et leurs habitudes pour vivre en semi-nomades. Ainsi, le village Huron établi près de Québec est régulièrement déplacé pour fuir les attaques des Iroquois. Ce sera le début d'une période d'exil continu pour les Wendats restants, au nombre de 300.

Ils occuperont environ six sites différents dans la province du Québec avant de s'établir définitivement dans le village de Lorette à  partir de 1697. On surnomme d'ailleurs cette cité « Village Huron » dans la région. D'abord établie sur l'île d'Orléans en 1651, la communauté s'installe par la suite à  Québec en 1668. Par la suite, les Wendats résideront temporairement à  Beauport, Notre Dame de Foy, à  l'Ancienne-Lorette, puis à  la Nouvelle Lorette en 1673, où ils habitent encore aujourd'hui. Un autre fait marquant viendra aggraver la situation précaire de cette population persécutée : en 1653, les Français signent un traité de paix exclusif avec les Iroquois, fermant les yeux sur les exactions sur les populations locales. Les Hurons-Wendat doivent désormais se défendre seuls, sans l'aide de la puissance coloniale française qui avait implicitement autorisé les Iroquois à  poursuivre leurs raids. Trois siècles plus tard, la Lorette, que l'on appelait jusque-là  « Village-Huron », changera officiellement de nom pour s'appeler « Wendake », en l'honneur de l'ancien pays.

Voyage au Québec : où en apprendre plus sur les Huron Wendat ?

Situé au cœur de la ville de Québec, dans la réserve de Wendake, le long de la rivière Akiawenrahk (Saint-Charles), le Musée huron-wendat présente l'histoire et la culture de la nation huronne-wendat à  travers des artefacts, des reproductions d'objets d'époque, des récits historiques et des projections. Inauguré en 2008 et considéré comme une « institution nationale » de la nation Wendat, le Musée huron-wendat permet aux visiteurs de découvrir et de vivre les coutumes ancestrales de la communauté. Avant même d'entrer dans le bâtiment, vous vous mettrez dans le bain grâce à  sa forme conique rappelant celle d'un fumoir indien. La structure du musée rappelle celle d'une palissade tronquée, symbole de paix et de tolérance.

Le musée a ouvert ses portes en mars 2008 et a reçu en 2009 un Prix d'excellence de la Société des musées québécois. L'exposition permanente principale couvre trois thèmes majeurs : les territoires, la mémoire et la connaissance de cette nation ancestrale. Cette exposition interactive vous fera découvrir une collection rare d'objets anciens. C'est une véritable immersion dans la culture de Wendake que vous vivrez dans ce musée aux nombreuses curiosités. Les objets de la collection huronne-wendat ont été rassemblés pendant plus de 40 ans par le « conseil de bande » (l'assemblée des élus gouvernant une bande indienne). On y retrouve notamment des costumes, des meubles, des textiles, des bijoux et d'autres objets du quotidien de la culture des Huron-Wendat.

Au rez-de-chaussée du musée, des expositions temporaires proposent aux visiteurs des focus sur un aspect déterminé de la culture huronne-wendat ou d'un autre peuple des Premières Nations du Canada. Le musée a une mission éducative et invite les élèves canadiens (et américains) à  divers ateliers et activités ludiques pour les aider à  mieux comprendre l'histoire des Premières Nations.

Les Huron-Wendat aujourd'hui

Bien qu'ils aient fait en sorte de préserver leurs spécificités culturelles, les Huron-Wendat, entourés de nations hostiles depuis leur installation au Québec, ont souffert de la mixité et des influences françaises, britanniques et des autres peuples autochtones. Néanmoins, ils ont survécu et sont très aujourd'hui impliqués dans la politique autochtone de la province de Québec. La maîtrise du français est l'un des grands avantages des Huron-Wendat par rapport à  d'autres groupes autochtones du Québec. De nombreux jeunes Wendat sont bilingues, parlant le français et l'anglais, en plus de leur langue Wendat.

En 1990, Conrad et George Sioui, deux frères de Wendake, ont pris part à  une importante décision de la Cour suprême qui allait impliquer tous les peuples autochtones du Canada. Les frères Sioui s'étaient installés dans le parc Jacques-Cartier, au nord de Québec. Ils ont abattu des arbres, fait du feu et campé. Ils ont ensuite été arrêtés pour avoir coupé des arbres sans permis dans un parc provincial. Les frères Sioui sont allés jusqu'au plus haut tribunal du pays, la Cour suprême du Canada, pour contester ces accusations. Ils ont affirmé qu'en tant que peuple huron, ils avaient le droit de pratiquer librement leurs traditions en vertu d'un traité signé avec le gouvernement britannique en 1760.

Cela comprenait donc le camping, les feux de camp et la coupe du bois de chauffage pour survivre à  l'hiver. La Cour suprême du Canada a déclaré qu'en vertu de la loi, les Autochtones ne pouvaient être empêchés de pratiquer leurs traditions dans leur région historique. L'affaire Sioui a changé la façon dont les tribunaux canadiens interprètent les traités autochtones, réduisant de moitié les inculpations pour chasse ou pêche illégale à  l'encontre des peuples natifs de la région.

La renaissance de la langue Wendat

À Lorette, au Québec, l'usage de la langue wendat est tombé en désuétude au XIXe siècle en raison de divers facteurs démographiques, économiques et sociaux. Bien qu'il soit difficile le moment « M » qui a signé le recul de cette langue native, on estime que les derniers orateurs ont péri lors de la seconde moitié du XIXe siècle, laissant cette langue nationale en « sommeil ». Ce n'est que quelques décennies plus tard que les membres de la nation huronne-wendat, conscients de l'importance de leur langue ancestrale, tenteront de la ressusciter. A la fin des années 1970 et au début des années 1980, diverses initiatives prises par des particuliers donneront de l'élan à  un mouvement visant le retour de la langue wendat. Le comité des parents d'élèves des écoles primaires de la région ont demandé aux autorités locales de multiplier les efforts pour intégrer la langue dans le programme scolaire. Au début des années 1990, la revitalisation des pratiques rituelles traditionnelles a encouragé cette dynamique linguistique. A partir de la fin du XXe siècle, les cérémonies traditionnelles se déroulent en langue Wendat.

Au cours de la même période, le Conseil de bande huron-wendat a lancé des initiatives pratiques avec l'embauche de linguistes et de chercheurs, la création de comités communautaires et le lancement de cours d'initiation gratuits pour favoriser la réappropriation de la langue. Parallèlement, des membres de la Nation ont créé une organisation à  but non lucratif, la Société Agondachia, qui propose des cours d'initiation à  la langue Wendat. C'est au début des années 2000 que le Conseil de bande huron-wendat a confié le projet linguistique à  l'administration de l'école primaire locale. Un linguiste wendat a été engagé pour travailler à  la standardisation de l'orthographe. Un comité linguistique a été formé par des membres de la communauté pour formuler des recommandations et combler les lacunes de la langue écrite.